L’écobuage, un feu de tradition sous haute surveillance




Par les temps qui courent, on pourrait croire que jouer avec le feu, c’est chercher les ennuis. Et pourtant, dans les Pyrénées-Atlantiques, on continue d’allumer des mèches… mais pour la bonne cause ! Bienvenue dans le monde fascinant de l’écobuage, cette technique ancestrale où l’on met le feu aux poudres – ou plutôt aux broussailles – pour préserver les pâturages et éviter que la montagne ne devienne une jungle impraticable

L’écobuage, c’est un peu comme un grand ménage de printemps… sauf qu’il se fait l’hiver et avec un briquet. Connue aussi sous le nom de « brûlage pastoral », cette pratique consiste à flamber les broussailles et les arbustes envahissants pour laisser la place aux belles herbes tendres, parfaites pour les troupeaux.

Dans les estives des Pyrénées-Atlantiques, c’est pas de la fumée sans feu : on parle d’un vrai coup de balai écologique. En brûlant les vieilles plantes desséchées, on nettoie les pâturages, on évite l’embroussaillement et on offre aux brebis un tapis végétal digne d’un palace cinq étoiles.

Un feu de camp géant, mais pas sans règles !

Bien sûr, on ne joue pas aux pyromanes en pleine montagne sans garde-fou. Ici, le feu est bien gardé, et les règles sont plus strictes qu’un contrôle douanier en période de chasse.

Les arrêtés préfectoraux imposent un mode d’emploi aussi précis qu’une recette de soufflé :

  • Pas de brûlage quand Eole fait des siennes ou que le sol est aussi sec qu’un biscuit apéritif.
  • Obligation de prévenir le SDIS (pompiers), histoire qu’ils ne débarquent pas sirènes hurlantes au premier nuage de fumée.
  • Distances de sécurité à respecter, sous peine de transformer un champ de bruyères en Barbecue des Enfers.

Pour que tout se passe bien, les commissions locales d’écobuage font la police du feu. Éleveurs, chasseurs et élus mettent leurs nez (et leurs extincteurs) dans les opérations, histoire d’éviter qu’un feu utile ne se transforme en incendie catastrophe digne d’un film hollywoodien.

Feu vert pour la biodiversité

Contrairement aux idées reçues, brûler, c’est protéger. Enfin, quand c’est fait avec méthode.

L’écobuage n’a pas que des flammes au cul : il a aussi des atouts environnementaux. En nettoyant la végétation sèche, il évite les incendies incontrôlés et prépare le terrain pour un renouveau de la flore. Certaines espèces, comme les orchidées sauvages ou les insectes pollinisateurs, profitent même de cette remise à zéro.

Et puis, c’est pas parce qu’on flambe qu’on dévaste : les herbes repoussent plus vite qu’un fumeur après une pause clope. Ce renouveau végétal attire les herbivores et dynamise l’écosystème local. En prime, on réduit les risques d’avalanches en empêchant les masses de neige de glisser sur des pentes devenues trop denses.

Bref, un feu bien géré, c’est la crème brûlée des pâturages : croustillant à l’extérieur, tendre à l’intérieur.

Ça brûle aussi côté sécurité

Mais attention : l’écobuage, c’est pas non plus une partie de grillades entre potes. Quand ça part en vrille, ça peut devenir plus chaud que la braise.

En avril dernier, un agriculteur ardéchois y a laissé sa vie en tentant d’éteindre un feu qui lui avait échappé. Un triste rappel que, même maîtrisé, le feu reste une bête sauvage prête à s’emballer.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, les vents capricieux et les épisodes de sécheresse rendent l’exercice encore plus risqué. En avril toujours, près de Larrau, 100 hectares sont partis en fumée après un écobuage mal maîtrisé.

Et il n’y a pas que la végétation qui trinque : les fumées peuvent provoquer des problèmes respiratoires chez les habitants et rendre les routes aussi dangereuses qu’un rodéo de pilotes de Citroën !

Tutoriel anti-bourde : quand la montagne met son gilet pare-feu

Pour éviter de se brûler les ailes, le département a sorti l’artillerie lourde : un Schéma départemental d’écobuage.

Ce plan d’attaque encadre la pratique avec des règles béton :

  • Formations obligatoires pour les agriculteurs, histoire d’apprendre à allumer sans tout faire flamber.
  • Météo surveillée comme le lait sur le feu avant de donner le top départ.
  • Équipement pro : des torches et des extincteurs à la place des allumettes et des arrosoirs.

Le but ? Garder la tradition vivante tout en la rendant aussi sûre qu’une veilleuse de nuit.

Lors de la dernière réunion de l’Association départementale des Élus de la Montagne (ADEM), le feu a été au cœur des discussions. Si l’écobuage fait l’unanimité pour ses bienfaits pastoraux, la crainte du loup a ravivé les tensions.

Face à ce prédateur, certains réclament un classement en “Zone difficilement protégeable”, histoire de protéger leurs troupeaux avec plus de moyens. Entre bêtes à cornes et bêtes à crocs, la montagne n’a pas fini d’être un terrain de combat.

L’écobuage, c’est un feu de camp géant avec permis de brûler. Mais pour éviter que la fête ne vire au barbecue géant, il faut rester sur ses gardes et respecter des règles aussi strictes qu’un concours de danse synchronisée.

Entre tradition et modernité, entre pastoralisme et écologie, la montagne doit marcher sur des braises. Mais si les agriculteurs continuent d’allumer des feux intelligents plutôt que des brasiers incontrôlés, les Pyrénées-Atlantiques pourront garder leurs pâturages au vert… sans virer au noir.


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