Dans la grande brigade du paysage gastronomique basque, un nouveau chef d’orchestre vient d’entrer en scène, toque vissée et idées fraîches. Adrien Zedda, accompagné du sommelier-voyageur Thomas Bouanich, ouvre à Biarritz une table où les légumes se prennent pour des stars de cinéma et les poissons marins jouent les seconds rôles… mais avec un charisme d’huître perlière. Bienvenue chez Dialogues, un lieu où la conversation se mène à coups de fourchette et de verres bien remplis
On connaissait le Zedda comme un chef prodige, celui qui à 17 ans, débarquait dans Objectif Top Chef comme d’autres débarquent en cuisine familiale, avec les yeux qui brillent et les mains déjà pleines de talent. Mais avant les caméras, il y avait déjà les fourneaux, les casseroles et les maîtres d’apprentissage bien réels, comme le chef étoilé Julien Thomasson aux Ambassadeurs, qui lui transmet l’art de ciseler la précision et de mijoter la patience.
C’est pourtant à l’autre bout du monde, au Royal Mail Hotel de Melbourne, que le jeune Adrien découvre son « vrai moi » culinaire : une cuisine végétale, précise, presque chorégraphiée, où chaque feuille de basilic a un rôle, et chaque fleur comestible sa réplique. Huit mois à travailler au rythme de l’été australien, à écouter le murmure des légumes et à dresser les assiettes comme des jardins miniatures.
Côté salle, Thomas Bouanich est son alter ego liquide. D’abord tenté par la médecine et la kiné, il prend finalement un virage à 180° pour suivre la voie de l’hospitalité. Direction le MBA de Vatel Lyon, puis les routes du monde : Japon, Sénégal, Argentine… De quoi se composer une carte aromatique personnelle, mélange de saké, d’épices africaines et de malbec argentin. Sa philosophie ? Un restaurant, c’est avant tout un lieu d’échange, comme une longue tablée où le vin se sert avec l’accent du terroir et le sourire du sommelier.
De Lyon à l’océan : un scénario bien ficelé
En 2018, ils créent Culina Hortus, une table végétarienne ambitieuse en plein Lyon, le pays des bouchons et des quenelles. Pari osé ? Oui. Réussi ? Plus qu’un soufflé au Grand Marnier. Résultat : deux toques au Gault&Millau, Trophée Jeune Talent 2020, et surtout le titre de meilleur restaurant végétarien du monde par We’re Smart.
Fort de ce succès, le duo décide de tourner une nouvelle scène. Mais cette fois, décors marins : Biarritz, ses marchés odorants, ses pêcheurs bavards, ses surfeurs qui rêvent d’algues fraîches après la vague. Thomas connaît la ville pour y avoir travaillé à l’Hôtel du Palais. Adrien, lui, est prêt à ajouter un peu d’iode à son répertoire végétal.
Dialogues : un script à deux voix
Le concept est simple et savoureux : un lieu où le végétal rencontre le marin dans un tête-à-tête gastronomique. Ici, chaque assiette est un dialogue. La tomate discute avec l’anchois, la carotte flirte avec la coquille Saint-Jacques, et la feuille de shiso s’invite dans la conversation.
Deux scènes pour ce spectacle culinaire :
- La Table du Chef : 30 couverts, dont 5 au comptoir, comme un front row de défilé gastronomique. On y goûte deux menus : l’un 100 % végétal, l’autre où la mer s’invite en douce, toujours en dialogue avec le potager. Les dressages sont des œuvres éphémères, où le vert, l’orange et le nacré jouent une symphonie visuelle.
- La Cave à Manger : ambiance plus décontractée. On y parle fort, on rit, on se ressert. Les assiettes sont pensées pour le partage, comme un tapas bar qui aurait pris des cours de haute couture culinaire. On picore, on trinque, on refait le monde entre un houmous aux algues et un verre de chenin bien sec.

Les dialogues cachés dans l’assiette
La force du lieu, c’est cette conversation permanente :
– Entre le chef et ses producteurs, qui livrent légumes croquants, poissons de ligne, herbes cueillies à l’aube.
– Entre l’océan et la terre, qui s’échangent recettes et secrets.
– Entre le client et l’assiette, où chaque bouchée répond à la précédente.
Là, une betterave rôtie murmure avec un sabayon au citron confit. Ici, une huître chaude se laisse bercer par une émulsion d’oseille. Les desserts, signés Margaux Boisson, apportent la note finale, comme un dernier mot doux avant de plier la nappe.
La cave : dialogues liquides
Thomas a mis sept ans à écrire cette carte des vins, et ça se sent. Près de 500 références, allant du grand cru classé au petit domaine naturel qui travaille la vigne comme un jardin d’enfants. On y trouve aussi de beaux spiritueux, du whisky japonais au rhum ambré, en passant par la chartreuse et des eaux-de-vie qui donnent envie de philosopher.
Ici, on ne choisit pas le vin comme on prend un ticket de métro : on se laisse guider, on découvre, on voyage d’un verre à l’autre. Et chaque accord avec les plats est pensé comme une réplique de théâtre : l’un complète l’autre, sans jamais lui voler la vedette.
Pourquoi on y reviendra
Parce qu’il y a dans ce restaurant une authenticité qui se sent dès la première bouchée.
Parce que la cuisine marine et végétale, ici, ce n’est pas une mode : c’est une conviction, servie avec le sourire et une maîtrise digne d’un étoilé.
Parce qu’on aime cette idée de dialogue, pas seulement entre les ingrédients, mais entre les gens : à table, au comptoir, dans la cave.
Et puis, avouons-le, parce qu’on veut goûter à nouveau ce dessert au chocolat noir et kombu, juste pour vérifier qu’on ne l’a pas rêvé.
Dialogues – 11, rue Helder, Biarritz
Table du Chef : du mardi au samedi soir, jeudi à dimanche midi
Cave à Manger : du mardi au samedi soir dès 18h
Réservation conseillée – conversations garanties.
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