Depuis quelque temps, le true crime est au podcast ce que le beurre salé est à la Bretagne : une évidence. Et Hollywood l’a bien compris. Après Only Murders in the Building et Based on a True Story, Netflix dégaine Bodkin, une série qui envoie un trio de journalistes-podcasteurs dans un village irlandais où l’ambiance oscille entre Broadchurch et une pub touristique pour la verte Erin. Sur le papier, le cocktail promet une enquête, de l’humour noir, des personnages en décalage et un soupçon de folklore. Mais à force de jouer avec les clichés, Bodkin finit par enfoncer des portes déjà bien ouvertes
Du mystère, du podcast et beaucoup de Guinness
L’histoire commence avec Gilbert, prononcer Guilbeurte (Will Forte), un podcasteur américain aussi enthousiaste qu’un ado découvrant son premier micro. Accompagné d’Emmy (Robyn Cara), sa jeune assistante impressionnable, et de Dove (Siobhán Cullen), une journaliste d’investigation irlandaise désabusée, il débarque dans le paisible village de Bodkin pour enquêter sur une affaire classée : la disparition de trois adolescents, vingt-cinq ans plus tôt, lors d’une fête locale aux allures de Samhain. Pour les incultes, c’est l’équivalent d’Halloween, mais en mieux.
Bien sûr, le village où tout le monde connaît tout le monde recèle plus de secrets qu’un épisode de Desperate Housewives. L’épicière a un regard fuyant, le vieux du pub parle par énigmes, les nonnes du coin organisent des retraites de yoga suspectes… Bref, si vous cherchez un endroit où tout est trop normal, vous l’avez trouvé.
À la manière d’un Only Murders in the Building version celte, Bodkin joue la carte du podcast-enquête, avec une mise en abyme qui frôle parfois l’absurde. Nos apprentis détectives avancent au rythme de leurs enregistrements, se perdant dans un dédale de fausses pistes et de révélations qui tombent souvent… à plat. L’humour pince-sans-rire fonctionne par moments, surtout grâce à Will Forte, parfait en Américain qui ne comprend rien mais parle fort.
Mais si la série parodie la fascination des médias pour les cold cases, elle tombe elle-même dans le piège qu’elle dénonce : une intrigue qui traîne en longueur et un suspense qui tient parfois du pétard mouillé.
Clichés irlandais en pagaille
L’Irlande a souvent eu droit à son lot de caricatures cinématographiques, et Bodkin ne fait pas exception. Vous aimez les pubs sombres où l’on parle en murmurant autour d’une pinte tiède ? Les villageois mystérieux qui s’échangent des regards en coin dès que des étrangers posent une question ? Les noms de famille qui sonnent comme des générateurs automatiques de folklore ? Bonne nouvelle, tout est là.
Le problème, c’est que Bodkin hésite entre moquer ces clichés et les embrasser. Résultat : on se retrouve avec une vision de l’Irlande qui oscille entre la carte postale et la parodie involontaire. Même les décors verdoyants, pourtant magnifiques, finissent par ressembler à un spot de l’office du tourisme.

Si Will Forte apporte une touche décalée bienvenue, c’est surtout Siobhán Cullen qui tire son épingle du jeu. Son personnage de journaliste blasée, forcée de revenir sur sa terre natale, apporte une vraie nuance émotionnelle. Dommage que le scénario ne lui offre pas plus de matière. Les seconds rôles, eux, sont savoureux : David Wilmot en ancien trafiquant surnommé The Badger (Le blaireau pour les anglophobes), Fionnula Flanagan en nonne reconvertie en coach spirituel… Des trognes taillées pour le crime.
Verdict : un plaisir coupable, mais pas inoubliable
Alors, Bodkin vaut-il le détour ? Oui, si vous cherchez une série légère pour accompagner un dimanche pluvieux. Non, si vous espériez un vrai thriller haletant ou une satire mordante du true crime.
C’est un peu comme une Guinness servie tiède : on la boit parce qu’on est là, parce que l’ambiance est chouette et parce que ça fait partie du folklore. Mais au fond, on sait qu’on aurait pu trouver mieux.
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