À Saint-Jean-Pied-de-Port, les rues d’Espagne et de la Citadelle vibrent de vie l’été. Les pèlerins y font halte, les touristes y défilent, et les boutiques en profitent pour engranger les euros. Mais une fois le dernier touriste parti, l’hiver s’installe, et avec lui, un calme parfois trop plat. On y entendrait presque les grillons, si ces derniers ne migraient pas aussi pour des températures plus clémentes. C’est justement pour éviter que la vieille ville ne se transforme en désert commercial dès les premières neiges que la municipalité a décidé de sortir le grand jeu : une prime de 200 euros par mois pour qui ose ouvrir un commerce à l’année. La mairie fait les soldes et ce n’est pas une blague
L’opération “Petite ville de demain” a permis de lever le voile sur une tendance : 13 % des commerces de Saint-Jean-Pied-de-Port sont saisonniers. Pas de quoi déclencher l’alerte rouge, mais tout de même, la pente est glissante, comme le reconnaît Peio Idiart, élu et commerçant lui-même. Et quand ça glisse, mieux vaut sortir les crampons avant de finir en bas de la côte. D’où cette brillante idée : offrir 200 euros par mois pendant deux ans à ceux qui résistent à l’appel du soleil et choisissent de tenir boutique aussi en plein hiver.
Le commerce hivernal, une espèce en voie de disparition ?
Avec cette aide, la mairie espère bien convaincre les commerçants de ne pas ranger leurs stocks à la première gelée. Trois d’entre eux ont déjà mordu à l’hameçon. Un cordonnier, un pâtissier, et Jon Xabi Insausti, propriétaire d’Olatua, un magasin de streetwear et de skates. Et ouais, des skates en pleine montagne basque ! “Ça a été décisif,” avoue Jon Xabi, “Ces 200 euros, je ne les avais pas prévus dans mon business plan, et ils m’ont convaincu d’ouvrir mon magasin.” Voilà un commerçant qui ne dérape pas dans ses finances.
La condition pour toucher le pactole ? S’installer dans la vieille ville, cœur historique et stratégique de Saint-Jean-Pied-de-Port. Pas question d’ouvrir à moitié, en mode estival. Il faut rester ouvert toute l’année, même en février, quand le vent souffle et que le thermomètre joue la tragédie grecque. Mais pour une zone de chalandise estimée à 15 000 personnes, ces 200 euros peuvent faire la différence.
Avec un budget total de 48 000 euros, la municipalité cherche à convaincre dix commerces de faire le pari du commerce hivernal. Certes, les 200 euros mensuels ne permettront pas d’investir dans des panneaux solaires pour illuminer les rues d’Espagne et de la Citadelle en plein mois de janvier, mais ils pourraient bien être la bouée de sauvetage qui maintient ces commerces à flot, même dans les eaux glaciales de l’hiver basque.
Ainsi, Saint-Jean-Pied-de-Port lance un appel : commerçants de tout poil, si vous avez l’audace d’ouvrir une boutique où l’on trouve autre chose que des souvenirs de l’été, le pays basque pourrait bien devenir votre nouvelle terre promise. Et cet hiver, la mairie pourrait aussi bien devenir votre meilleur client !