L’équipe espagnole au Pays basque : Applaudissements sur la touche et drapeaux discrets

Lundi soir, Miguel Martínez se trouvait devant un bar de Bilbao, essayant de suivre le match de l’équipe d’Espagne tout en évitant de faire des vagues. « Une mission impossible » diriez-vous ? Pas pour Miguel. Lui qui avait suivi les deux premiers matchs avec son fils de 13 ans à Séville, savait qu’un petit tour de passe-passe diplomatique était de mise

À Séville, c’est fiesta totale avec des drapeaux espagnols à chaque coin de rue, des t-shirts rouges et jaunes en veux-tu en voilà, et des célébrations dignes de la fin de la prohibition. À Bilbao, c’est plutôt drapeaux basques, Palestiniens, et arc-en-ciel. Bref, le rouge et jaune espagnol, c’est loin d’être leur came.

Quand l’Espagne a marqué contre l’Albanie, Miguel et ses collègues ont opté pour des applaudissements discrets, presque un mime. « On dirait qu’on fait un haka muet », plaisanta un de ses collègues. Miguel, tout en retenue, déclara : « Mieux vaut être discret ici. Je ne sais pas ce que les gens pensent de l’équipe nationale. » T’as pas tort Miguelounet, au Pays basque, l’Espagne est considérée comme un autre pays…

Il n’avait pas tort. Depuis 1967, l’équipe nationale n’avait plus mis les crampons à Bilbao, évitant soigneusement le terrain comme une diva évite les flaques d’eau avant un concert. ETA oblige, le foot espagnol préférait jouer à domicile, bien loin de la ferveur basque.

En 2014, Bilbao devait accueillir des matchs de l’Euro 2020. Un politicien local, avec un flair pour le dramatique, prédit des « chars dans les rues ». Finalement, la pandémie a redistribué les cartes, et Séville a récupéré l’organisation. Ouf, soupiraient certains, car l’accueil aurait pu être aussi chaleureux qu’un stade vide.

Cette année, Aitor Esteban, un politicien basque, déclara encore ne pas supporter l’Espagne à l’Euro 2024. « Mon équipe, c’est l’équipe basque », annonça-t-il. Mais tout n’est pas si noir. Pour Iñaki Álvarez, les choses changent. « Il y a vingt ans, personne n’osait porter le maillot espagnol à Bilbao. Aujourd’hui, on en voit quelques-uns, et ça passe », dit-il en jonglant avec un ballon sur la Plaza Nueva. Un peu comme se trimballer dans les quartiers nord de Marseille avec un maillot du PSG.

Miguel Martínez, lui, avait trouvé sans peine un bar diffusant le match espagnol. En 2008, raconte la légende, un seul bar à Bilbao avait osé montrer la finale de l’Euro entre l’Espagne et l’Allemagne, et c’était un café à thème allemand. Et oui, le teuton est téméraire…

Ainsi, malgré les applaudissements hésitants et les drapeaux absents, une petite révolution se trame. Bilbao, tout en gardant son esprit rebelle, commence à laisser entrer une pincée de ferveur nationale. Doucement, mais sûrement.


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