La Bourse européenne avait la banane en milieu de séance, mais voilà qu’un rapport sur l’emploi US est venu leur piquer le dessert. Résultat : CAC et EuroStoxx finissent dans le rouge. Derrière les chiffres mollassons du marché du travail américain, les investisseurs rêvent déjà d’une Fed qui leur servirait une tournée de baisse des taux. Mais en attendant, ça grogne dans les portefeuilles et ça couine dans les carnets d’ordres
La semaine boursière avait démarré peinarde, ce lundi matin. Mais fallait pas rêver : vendredi, le rapport sur l’emploi US a débarqué comme un contrôleur des impôts dans une partie de poker clandestine. Résultat des courses : le CAC 40 a fini sa course en glissade de 0,31 % à 7 674 points, l’EuroStoxx 50 s’est ramassé de 0,65 % à 5 312, et Wall Street a suivi la même pente savonneuse. Moralité : même quand c’est l’Amérique qui a la crève, c’est l’Europe qui éternue.
Un job report qui fait plouf
Les Ricains, d’habitude, c’est plutôt les gros bras du marché du taf. Mais là, c’est service minimum : seulement 22 000 créations d’emplois en août, au lieu des 75 000 attendues. Autant dire que les analystes, qui misaient sur un chiffre costaud, se sont retrouvés comme des pigeons à la sortie du casino. En juillet, on parlait encore de 79 000 jobs créés. Autant dire qu’août, c’est le mois où l’économie US est partie en vacances sans prévenir.
Évidemment, ça fout un coup de pression au dollar et aux rendements obligataires. Le 10 ans US, ce bon vieux baromètre de l’humeur des marchés, s’est retrouvé au plus bas depuis avril.
La Fed en mode serveur de bistrot
Pour beaucoup, ces chiffres mollassons sont un signal clair : la Fed va devoir jouer les Père Noël et sortir le shaker à baisses de taux. Les investisseurs voient déjà Jerome Powell, le patron de la Réserve fédérale, enfiler son tablier de barman le 17 septembre et servir une tournée générale d’assouplissement monétaire. Certains parient même sur un demi-point direct, histoire de calmer la bande de traders qui commencent à transpirer comme des poulets rôtis sous une lampe.
Mais attention, comme le dit Christophe Boucher (ABN Amro), faut pas s’affoler non plus. L’économie US tient encore la baraque : les ménages consomment, les entreprises margent, et la récession, c’est pas pour demain. Disons que la Fed pourrait offrir un petit remontant préventif, histoire d’éviter la gueule de bois.
Les Allemands aussi trinquent
Pendant ce temps, côté Allemagne, ça sent pas la choucroute flambée : les commandes à l’industrie se sont vautrées de 2,9 % en juillet, alors que les économistes misaient sur +0,5 %. Raté. Déjà en juin, c’était la baisse (-0,2 %). Autant dire que l’usine allemande, d’habitude le moteur du Vieux Continent, a des ratés comme un combi Volkswagen sans bougie. Et quand Berlin tousse, Paris se mouche et Madrid sort les mouchoirs.
Le CAC 40 en mode montagnes russes
Sur la cote parisienne, y’avait quand même un peu d’animation. STMicroelectronics a caracolé en tête du CAC, porté par un relèvement de recommandation d’Exane BNP Paribas et par les bons résultats de Broadcom aux States. Le semi-conducteur, ça chauffe, ça brille, et ça fait grimper les cours comme une fusée.
En revanche, Stef, le champion du transport frigorifique, a pris une claque monumentale : -7,83 % après des résultats semestriels en mode frigo débranché. Résultat net en chute libre (-76,7 % à 15,8 millions), free cash flow encore négatif… Bref, un bilan qui donne la chair de poule, même aux plus endurcis.
Safran dans la zone de turbulences
Autre gadin notable : Safran. Le titre a fini en rouge (-0,96 %), plombé par une rumeur rapportée par le Financial Times. L’équipementier réfléchirait à céder une partie de son activité dans les cabines d’avion. Pas les sièges, mais tout le reste. Une opération qui pourrait valoir 1,5 milliard d’euros, mais qui inquiète les investisseurs : quand un avion commence à larguer du matos, c’est rarement bon signe pour le confort des passagers… et encore moins pour le portefeuille des actionnaires.
L’énergie éolienne souffle le chaud et le froid
À Copenhague, Orsted a tiré son épingle du jeu (+2,76 %). Pourtant, le groupe a abaissé ses prévisions d’Ebitda 2025. Motif : le vent a soufflé moins fort que prévu dans ses parcs offshore. Autrement dit, même Éole s’est mis en RTT. Résultat : un impact négatif de 1,2 milliard de couronnes danoises. Mais les investisseurs ont préféré voir le verre à moitié plein, misant sur la résilience du groupe. Comme quoi, parfois, même une brise peut donner des ailes.
Les ricains en mode cabossé
De l’autre côté de l’Atlantique, Dow Jones et consorts ont pas fait mieux. Vers 17h45, le Dow Jones perdait 0,54 %. Le Nasdaq et le S&P 500 suivaient la tendance. Le rapport ADP, publié la veille, avait déjà refroidi les ardeurs avec des créations d’emplois privées en-dessous des attentes. Bref, la confiance est partie en fumée.
L’euro fait le malin
Face à ce micmac, l’euro a repris du poil de la bête : +0,86 % à 1,1744 dollar. Comme quoi, quand l’Oncle Sam boite, la vieille Europe bombe un peu le torse. Mais attention à l’ivresse des hauteurs : l’euro fort, c’est sympa pour partir en vacances à Miami, mais ça plaît beaucoup moins aux exportateurs européens.
Macro en vrac : la tambouille des chiffres
- France : petit rayon de soleil, le déficit commercial s’allège en juillet (-6,5 milliards contre -6,7 avant). Importations en hausse de 0,3 milliard, exportations +0,5 milliard. Pas Byzance, mais ça sent moins la soupe à la grimace.
- Zone euro : le PIB a progressé de 0,1 % au deuxième trimestre (contre +0,6 % au premier). En gros, on avance, mais à la vitesse d’une 103 SP en côte.
- Salaire horaire US : +0,3 % en août, pile dans les clous. Au moins, là-dessus, pas de mauvaise surprise.
Les marchés en mode poker menteur
En résumé, cette semaine, les Bourses ont joué au poker avec des cartes un peu pourries. D’un côté, des jobs US en rade, de l’autre une Fed qui pourrait sortir le carnet de chèques pour rassurer tout le monde. Entre deux, l’Europe se demande si elle doit miser ou se coucher. Résultat : CAC et EuroStoxx finissent dans le rouge, Wall Street renifle, et les investisseurs sortent les calmants.
Et la suite ?
Tout le monde a les yeux rivés sur le 17 septembre, date du prochain round de la Fed. Si Powell sort la sulfateuse à taux, les marchés sabreront le champagne. Si c’est juste un petit coup de rabot, ça risque de grincer. En attendant, les investisseurs serrent les fesses, comptent leurs jetons, et espèrent que le prochain rapport US leur filera pas une nouvelle gueule de bois.