World Economic Forum/Ciaran McCrickard DR

Bruno Le Maire : Un ministre des dépenses, expert dans l’art du dérapage




Il est enfin temps pour Bruno Le Maire de ranger ses dossiers, vider ses tiroirs et peut-être réviser son CV avant de s’envoler vers de nouvelles aventures. Après sept années de bons et (surtout) moins bons services à la tête du ministère de l’Économie, notre cher Bruno s’apprête à tirer sa révérence. Et comme le veut l’adage : “On n’oublie jamais les meilleurs… ou les pires”. Et devinez dans quelle catégorie il est en train de se hisser ?

Qui aurait cru que Bruno Le Maire, ce clampin avec une tête de premier de la classe, ce champion incontesté des discours bien léchés et des promesses ambitieuses, finirait son mandat avec un trou financier aussi béant qu’une cratère lunaire ? Sept ans à Bercy, sept ans de malheur, c’est long. Très long. Mais c’est aussi le temps qu’il aura fallu à notre vaillant ministre pour transformer la gestion des finances publiques en un véritable rodéo incontrôlé. Déficit public, dette en hausse, crises à répétition, baisse des recettes fiscales… un cocktail explosif dont lui seul semble détenir la recette secrète.

La dernière en date ? Un joli “dérapage” – et pas des moindres – sur le déficit public, qui devrait grimper à 5,6% du PIB en 2024. Certes, on pourrait se dire que 0,1 point de PIB, ce n’est qu’un petit dixième de pourcent de plus. Après tout, qu’est-ce que quelques milliards entre amis ? Le problème, c’est que la Commission européenne, toujours un peu tatillonne, n’est pas vraiment fan de ces petites entorses. Ben non, là Ursula elle a tiqué quand même… en nous mettant à l’amende (comme si ça suffisait pas) et en nous mettant sous tutelle. Pour rappel, l’Union exige un déficit sous la barre des 3% et une dette inférieure à 60% du PIB. Mais chez Bruno, visiblement, les règles sont faites pour être dépass… explosées avec panache.

Des impôts qui disparaissent, un déficit qui apparaît

Reprenons les faits. Si le déficit dérape, ce n’est pas que de la faute des crises successives (même si ça aide à détourner l’attention), mais aussi en grande partie à cause d’une baisse des recettes fiscales. Pourquoi donc ? Eh bien, parce que Bruno a eu l’ingénieuse idée de baisser les impôts. Ce qui est toujours une bonne idée, sauf quand vous devez ensuite compter vos sous pour remplir les caisses de l’État. Entre la baisse de l’impôt sur les sociétés, la disparition de l’ISF et la flat tax, les recettes de l’État ont chuté plus vite qu’un soufflé sorti du four trop tôt.

Nos chers économistes, eux, ne se sont pas fait prier pour souligner que ce n’était peut-être pas la meilleure stratégie. Clément Carbonnier, professeur d’économie, nous éclaire : “Il faut d’abord produire de la richesse avant de la redistribuer“. Voilà la grande leçon de Bruno : produire la richesse en faisant des cadeaux fiscaux aux plus aisés dans l’espoir qu’ils partagent. Quand on fait appel à l’espoir, on peut d’ores et déjà se dire que l’idée est foireuse. Un peu comme inviter les plus riches à un buffet et espérer qu’ils vous laisseront quelques miettes. La fameuse théorie du ruissellement… ou du “ça va ruisseler pour moi, et les autres ?” Pas de chance, ça n’a pas marché comme prévu.

Évidemment, Bruno Le Maire n’a pas oublié de distribuer quelques douceurs aux 500 plus grosses fortunes de France. Eric Coquerel, président de la commission des finances, a d’ailleurs très gentiment rappelé que le patrimoine de ces derniers avait doublé entre 2017 et 2023. Mais, rassurez-vous, tout cela, c’est pour la croissance, les gars ! Seulement voilà, les emplois et investissements promis se font toujours attendre.

Avec une telle gestion, on pourrait croire que Bruno Le Maire est en fait un passionné d’économie circulaire. Comprenez par là qu’il fait tourner en rond tout le pays en prétendant que la croissance finira bien par arriver si l’on continue de creuser le déficit. D’un point de vue artistique, c’est presque admirable : il a su transformer les finances publiques en une véritable œuvre abstraite. Par contre, les résultats eux, sont on ne peut plus concrets !

Des crises, des crises, et encore des crises

Bien sûr, il ne faudrait pas être injuste. Les sept années de Bruno à Bercy n’ont pas été de tout repos. Entre la pandémie, la crise énergétique, les Gilets jaunes, l’autre nabot narcissique sur le trône et les manifestations tous azimuts, difficile de garder la tête froide. Et ces crises, c’est certain, ont eu un impact sur la dette publique. Mais quand même, 900 milliards d’euros de plus depuis 2017, ça commence à peser lourd.

« Presque un tiers de cette dette est imputable aux décisions de politique publique », selon Raul Sampognaro, économiste à l’OFCE. Autrement dit, à force de baisser les impôts et d’ouvrir les robinets de l’argent public, Bruno a fini par noyer le budget de l’État dans une mare de dettes. Mais que voulez-vous, on ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs… et Bruno semble avoir cassé tous les œufs du panier. Et patatra tortilla !

Un départ en fanfare… ou en désillusion ?

Alors, à l’aube de son départ, que retiendra-t-on de Bruno Le Maire ? Ses ambitions démesurées ? Ses promesses de redresser l’économie ? Ou bien ses échecs retentissants et ses petites maladresses budgétaires ? L’intéressé, lui, reste imperturbable : “Le retour à un déficit de 3% est tout à fait à notre portée”, martèle-t-il avec un optimisme à toute épreuve. Sans déconner, n’allez pas me dire qu’il croit ce qu’il dit ?!!!.

Finalement, Bruno Le Maire aura réussi une prouesse. Non pas celle de redresser les finances publiques, mais celle de devenir une figure presque mythique, une légende ou comment arriver à faire l’impossible. À chaque nouvelle annonce de dérapage budgétaire, il fait figure d’inspiration pour tous ceux qui rêvent de faire beaucoup… avec très peu. Ah mon Nono, une chose est sûre, on ne te regrettera pas !


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