Robert Louis Stevenson, petit gars gringalet venu des brumes d’Édimbourg, avait pourtant tout du type à préférer les fauteuils club et le thé tiède de 17h. Ben non. L’animal décide de foutre le camp de chez lui, son plaid sur l’épaule, son sac sur le dos, et de traverser les Cévennes à pied, avec pour seule copine une bourrique plus cabocharde qu’un douanier basque. Son bouquin ? Une sorte de Guide du Routard avant l’heure, mais sans bons plans restos, et avec un gros supplément de galères en pente raide
Dès les premières pages, on capte que Stevenson, niveau dressage d’âne, c’est pas le roi du rodéo. Modestine, l’ânesse en question, c’est pas une Formule 1, c’est une Deux-Chevaux avec un frein à main bloqué. Elle avance à la vitesse d’un escargot sous Tranxen 500, et encore, quand elle est motivée.
Résultat ? Le pauvre Stevenson se transforme en dresseur de fauve des bas-côtés, essayant de lui faire comprendre la notion de “marche avant”. Ça finit souvent en coups de bâton et en longues discussions philosophiques avec un animal qui s’en tamponne le coquillard, ou qui s’en balec pour les djeuns.
Des paysages à se faire des ampoules poétiques
Faut quand même l’dire : entre deux engueulades avec Modestine, notre Écossais s’en prend plein les mirettes. Les Cévennes, c’est pas le périph’ de Londres : ça grimpe, ça descend, ça sent bon le thym sauvage et la bouse fraîche. Les villages sont aussi paumés que pittoresques, et les habitants, entre deux verres de gnôle, ont toujours un petit mot pour le touriste à sabots.
Stevenson, lui, écrit comme un poète qui carbure au Kalimotxo (mais version XIXe siècle hein), avec des descriptions si jolies qu’on en oublierait presque qu’il pue la sueur et qu’il dort sur des paillasses humides.
Dieu, les Camisards et le chapeau de paille
Parce que Stevenson, il vient pas juste pour bronzer et manger du fromage de chèvre. Non, il a un cerveau aussi actif qu’un feu de camp dans une grotte humide. Il nous sort des pages entières sur la guerre des Camisards, les protestants qui en avaient ras la calotte de se faire astiquer la foi à coups de croix papales.
Bref, entre deux cailloux, il t’explique l’histoire des Cévennes façon prof d’histoire, et t’en ressors avec des notions que même Wikipédia aurait pas osé te refiler.

Une rando à la roots, sans GPS ni influenceurs
Là où Stevie est fort, c’est que son bouquin ne sent pas le fake. Pas de filtre Instagram sur les chemins défoncés, pas de #blessed ou de poses sur un rocher. Juste un gars un peu paumé qui marche pour oublier une histoire de cœur et trouver la paix. C’est brut, c’est touchant, c’est comme une vieille cantine en fer-blanc qu’on ressort pour les pique-niques.
Il dort dehors, mange mal, parle peu mais observe beaucoup. En gros, c’est Into the Wild, mais version crottin.
Une plume comme un Opinel affûté
Côté style, Robert Louis, c’est pas un gratte-papier du dimanche. Il balance ses phrases comme un mec qui connaît la rando ET la rime. Ça sent la moiteur des sous-bois, le frottement des chaussettes mouillées et la solitude du type qui s’ennuie en regardant une pierre pendant trois heures.
Mais c’est beau. Putain, c’est beau. Pas prétentieux, pas chiant, juste vivant.
Le GR70, ou comment marcher dans les godasses d’un mort célèbre
Depuis que le scottish a traîné ses godasses et ses rhumatismes dans les Cévennes, on a balisé son itinéraire pour les amoureux de la rando et de la prose qui claque. Le GR70, c’est son héritage. Chaque année, des milliers de randonneurs suivent le parcours comme des pèlerins littéraires. Certains avec des ânes (authentiques), d’autres avec des GPS, des softshells et des baskets qui coûtent un rein.
Mais tous finissent par comprendre que, comme Stevenson, le chemin est plus important que la destination. Et que Modestine, quelque part, c’est nous.
Une lecture qui sent le terroir et la sueur
Pas besoin d’aimer les ânes pour se marrer en lisant ce bouquin. Faut juste aimer les belles phrases, les emmerdes en descente, et les réflexions qui te tombent dessus comme une pluie fine au petit matin. Stevenson réussit à rendre la solitude joyeuse, l’effort noble, et les ampoules aux pieds presque philosophiques.
C’est un bouquin qui sent la poussière, le fromage de chèvre, l’ennui salutaire. Et qui donne envie de tout plaquer pour marcher jusqu’à n’en plus pouvoir.
Verdict : 5 fers à sabots sur 5
Un chef-d’œuvre à la cool, un hymne à la marche et à l’introspection, avec un âne en guest-star. Stevenson, c’était pas juste un randonneur en kilt : c’était un vrai poète de la godasse. Son livre ? Une rando littéraire à ne surtout pas louper.
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